Nan Goldin est une artiste fondamentale de la photographie contemporaine. Bruts, intimistes, ses instantanés aux couleurs vibrantes nous plongent dans son univers, son journal autobiographique visuel. Ses photographies sont marquées par son obsession de la vérité la plus crue, du réalisme le plus dépourvu de glorification. Son œuvre commence avant tout comme un travail de mémoire ; mémoire des moments passés avec sa « famille » du milieu de la nuit, mais surtout travail plus profond et continu de réappropriation de sa propre histoire. En effet, dès la préface de Ballade de la Dépendance sexuelle, son œuvre la plus connue, elle souligne : « Pendant des années, j’ai cru que j’étais obsédée par le besoin de rapporter chaque fait de ma vie de tous les jours. Mais j’ai réalisé récemment que ma motivation avait une raison d’être bien plus profonde. Je ne me souviens pas vraiment de ma sœur. […]Je me souviens d’une version d’elle, des choses qu’elle disait, des choses qui avaient un sens pour moi. Mais je ne me souviens pas de qui elle était réellement, de sa présence, de ses yeux, de sa voix. Je veux ne plus jamais avoir à dépendre de la version de mon histoire vue par d’autres. Je veux ne plus jamais perdre le vrai souvenir d’une personne. » De même, « Si chaque photographie est une histoire, alors l’accumulation de photographies permet presque de reconstituer l’expérience de la mémoire, de créer, en d’autres termes, une histoire sans fin. »
Depuis ses quinze ans, elle photographie ainsi sans relâche, capturant magistralement des instants uniques, amenés à ne jamais se répéter, et qui ne sont jamais mis en scène, dans un rejet du vocabulaire photographique académique et de son esthétisme. L’intimité des étreintes et des corps n’y est jamais voyeuriste, et exprime l’intense proximité que Nan Goldin crée avec ses modèles dont elle se sent intuitivement proche. C’est le cas notamment avec les transsexuels qu’elle photographie, premiers modèles qui la fascinent lors de sa jeunesse, qu’elle immortalise s’habillant, riant entre elles, ou se remaquillant, absorbées par leur propre reflet. Le miroir, en effet, tout comme le lit, sont des espaces majeurs de l’œuvre de Goldin, les lits en tant que champs de bataille, cocons écorchés par la solitude et la violence. Elle aime aussi observer les gens à travers leur image ; « J’aime photographier, par exemple, les gens qui se regardent dans la glace, parce que ce qui m’intéresse, c’est les gens et leur relation à eux-mêmes, confrontés à leur propre identité ». En effet, Nan Goldin se confronte à la question de l’identité, l’identité des gens qu’elle photographie, qu’elle choisit pour leur individualité intrinsèque. Pourtant à travers l’intimité et les histoires personnelles, la photographe s’intéresse à ce qu’il y a d’universel chez ses modèles, d’universel dans leur beauté.
Si la publication de Ballade déconcerte d’abord le public en 1986, l’œuvre de Nan Goldin a une grande influence sur ses contemporains ; la sensibilité et l’humanité sincère de son approche du sujet, ainsi que la dynamique de son travail, dont chaque photographie s’intègre à une « œuvre en cours » de slideshows et projections. Elle est également l’une des premières représentantes de l’esthétique de la photographie instantanée et de ses non-évènements.
Nancy Goldin, dite Nan Goldin, est née en 1953 à Washington. Elle commence la photographie très jeune, avant d’étudier l’art à Boston et Cambridge. Récemment, son travail a été exposé en 1996, lors d’une rétrospective organisée au Whitney Museum of American Art (New York), Contemporary Arts Museum (1999, Houston), Centre Georges Pompidou (2001, Paris), Musée d’Art Contemporain (2003, Montréal), Museum of Fine Arts (2007, Houston), Museu de Arte Moderna (2012, Rio de Janeiro), Museum of Modern Art (2016, New York).
Ses œuvres sont conservées à la collection Lambert (Avignon), Centre Georges Pompidou (Paris), Tate Modern (Londres), National Gallery of Victoria (Melbourne), Musée des Beaux Arts (Montréal), Museo National Reina Sofia (Madrid), Berlinische Galerie- Museum of Modern Art (Berlin), Metropolitan Museum (New York), Museum of Fine Arts (Boston), Art Institute (Chicago).
Nan Goldin is a fundamental artist in contemporary photography. Her rough and intimate snapshots of vibrant colours plunges us in her realm, her visual autobiographical diary. Her photographs are imprinted by her obsession for crude truth and reality deprived of any glorification. Above all, her work begins as a memory work; direct memory of moments shared with her “family” of the night life, but especially as a deep and continuous work to re-appropriate her own story. Indeed, in the preface of The Ballad of Sexual Dependency, her first and famous artwork, she states : “For years, I thought I was obsessed with the record-keeping of my day-to-day life. But recently, I’ve realized my motivation has deeper roots : I don’t really remember my sister. [...] I remember my version of her, of the things she said, of the things she meant to me. But I don’t remember the tangible sense of who she was, her presence, what her eyes looked like, what her voice sounded like. I don’t ever want to be susceptible to anyone else’s version of my own history. I don’t ever want to lose the real memory of anyone again.” And “If each picture is a story, the accumulation of these pictures comes closer to the experience of memory, a story without end.”
Since she is 15 years old, she restlessly takes photographs of every moment spent with her friends and lovers. Her photographs masterly capture unique never-to-be-repeated instants, without being ever staged, while she refutes the aesthetic vocabulary of academic photography. The intimacy of bodies and embraces is never that of the voyeur, but expresses Nan Goldin’s symbiotic relationship with those she photographs, feeling intuitively close to her models. The same sensitivity lies for example in the pictures of transsexuals, who fascinate her and are amongst her first models, and whom she immortalizes while dressing up, laughing together, or absorbed by their own reflect while putting some make-up on. Mirrors, thus, as well as beds, are crucial spaces in Goldin’s work. Beds are battlefields, cocoons mutilated by violence and loneliness. About the relationship between people and their own image, she says “I love photographing, for example, people looking at themselves in the mirror, because what I’m interested in is people and their relation to their self, confronted to their own identity.” Indeed, Nan Goldin confronts with the question of identity, of those she photographs, and whom she chooses for their intrinsic individuality. Yet, through intimacy and personal specific stories, the concerns she’s dealing with are universal, and express universal beauty of those she loves.
The Ballad’s publication in 1986 first bewildered the public, and Nan Goldin acquired a great influence on her contemporaries ; the sensitivity and honest empathy of her vision and the dynamics of her creative process, where each photograph is integrated to an ongoing artwork through slide shows. She is also one of the first representatives of the snapshot aesthetic of non-events.
Nancy Goldin was born in Washington in 1953. She begins photography quite young, before her art studies in Boston and Cambridge. Recently, her work was exhibited in a 1996 retrospective in the Whitney Museum of American Art (New York), Contemporary Arts Museum (1999, Houston), Centre Georges Pompidou (2001, Paris), Museum of Contemporary Art (2003, Montréal), Museum of Fine Arts (2007, Houston), Museu de Arte Moderna (2012, Rio de Janeiro), Museum of Modern Art (2016, New York).
Her works can be find in the Lambert Collection (Avignon), Centre Georges Pompidou (Paris), Tate Modern (Londres), National Gallery of Victoria (Melbourne), Museum of Fine Arts (Montréal), Museo National Reina Sofia (Madrid), Berlinische Galerie- Museum of Modern Art (Berlin), Metropolitan Museum (New York), Museum of Fine Arts (Boston), Art Institute (Chicago).